EXHIBITION
30 JAN - 03 MAI 2015
49 NORD 6 EST - FRAC LORRAINE - METZ (57)
La Voix du traducteur
Curateur : Martin Waldmeier
Vernissage : Jeudi 29 Janvier à 19h au Frac

Nicoline Van Harskamp, English Forecast, 2013. Performance/vidéo. Commande de la BMW Tate Live: Performance Room à la Tate Modern, Londres, 2013. Photo: Ana Escobar for Tate Photography © Nicoline van Harskamp & Tate
Langue maternelle, étrangère, officielle ou en voie de disparition,… qu’elle que soit la catégorie dans laquelle on la classe, une langue ne sert pas seulement à communiquer. Elle est un filtre par lequel passe notre expérience du monde. À travers elle, il est question de culture, de pouvoir et d’identité.
Alors, si « les limites de ma langue sont les limites de mon monde » (L. Wittgenstein), il est largement temps de les faire exploser…
Note d’intention du commissaire
“Au commencement était… la traduction”
Pour le poète et traducteur finnois Leevi Lehto, la traduction est le véritable fondement de toute culture. Langages et cultures sont reliés par des flux incessants qui leur permettent de croître et d’évoluer dans le temps. Grâce à la traduction, ce qui nous est étranger devient compréhensible. L’autre pénètre ainsi dans notre monde et, en retour, notre point de vue change et s’élargit.
Regroupant des artistes d’horizons différents, l’exposition La Voix du traducteur est une invitation à réfléchir ensemble à la question de la traduction dans un présent globalisé. Aujourd’hui, les traductions sont omniprésentes : elles facilitent le commerce international, assurent les négociations diplomatiques, participent à la diffusion quotidienne de l’information, permettent les communications en ligne entre pays et continents, nous initient aux productions cinématographiques et littéraires étrangères. Elles nous donnent accès à la connaissance du monde… Le rythme et l’intensité de la communication et de la circulation à l’échelle du globe s’accélèrent et le besoin de traduction s’intensifie.
Lost in Translation – le film à succès de S. Coppola sorti en 2003 – n’est pas le premier à avoir associé les notions de perte et de traduction. Les langues et les cultures ne sont pas des manières différentes de dire la même chose mais bien des manières différentes de dire autre chose. La traduction est donc toujours une approximation, une médiation difficile entre expressions de l’expérience humaine.
Comment peut-on alors imaginer les échanges linguistiques : non pas comme un défi ou une difficulté, mais comme une source de créativité et d’apprentissage ? Comment peut-on comprendre autrement le monde à travers différentes langues ? La traduction peut-elle être un lieu d’activité critique voire subversive ?
La traduction n’est pas un phénomène nouveau, malgré la mondialisation. Les confrontations entre cultures ont toujours nécessité la présence d’un traducteur. Au cours de l’histoire moderne, ces rencontres se sont souvent tenues sur un mode qui n’était ni égalitaire ni pacifique. Aujourd’hui, l’anglais est de plus en plus perçu comme une langue hégémonique et critiqué car il supplante des langues minoritaires et vernaculaires. Sa puissance est néanmoins précédée par des siècles de colonialisme(s) et d’impérialisme(s) qui ont imposé avant lui leurs propres langues aux peuples dominés, supprimant systématiquement ainsi les cultures locales.
Si l’on veut affirmer qu’au commencement était la traduction, on doit naturellement aussi reconnaître que, dès ses débuts, la traduction a été un lieu de relations de pouvoir entre colonisateurs/colonisés, centres/périphéries, cultures minoritaires/empires. Ces relations persistent encore aujourd’hui, mais sous d’autres formes.
Le titre La Voix du traducteur propose deux axes de réflexion. D’une part, il rend visible l’activité du traducteur, et fait entendre sa voix. En la replaçant au centre de la scène, il reconnaît qu’elle est une source de connaissance privilégiée sur la nature des diversités culturelles et sur les différentes façons d’exprimer une identité à travers le langage. D’autre part, il fait du traducteur une métaphore critique de la situation linguistique propre à la mondialisation et à l’ère post-coloniale : nécessité croissante d’apprendre des langues étrangères (avec ses joies et ses peines) ; multilinguisme volontaire et involontaire des migrants ; cultures hybrides et multitude des accents présents dans l’expression et l’expérience du monde.
La traduction ne renvoie plus seulement à une profession ou à une activité. Elle représente la condition humaine. Et de plus en plus souvent : le traducteur, c’est nous…
Martin Waldmeier
Londres, 14/11/2014
PRIX JEUNES CURATEURS 2014 MARCO/FRAC LORRAINE/SFKM
Depuis 2010, le Frac Lorraine et le MARCO conjuguent leurs énergies pour proposer un Prix destiné aux jeunes curateurs. En 2014, ils ont été rejoints par le SFKM, intensifiant ainsi encore plus la dimension internationale de cet événement.
Lauréat de cette édition, Martin Waldmeier succède à Inti Guerrero (2010), Anja Isabel Schneider (2011) et Catalina Lozano (2012).
29 Mai – 30 Août 2015
MARCO, Museo de Arte Contemporánea Vigo – Espagne
www.marcovigo.com
31 Octobre 2015 – 31 Janvier 2016
SFKM, SOGN OG FJORDANE KUNSTMUSEUM Førde – Norvège
www.sfk.museum.no
Martin Waldmeier est curateur et chercheur. Il mène actuellement une thèse de doctorat en cultures visuelles au Goldsmiths, Université de Londres, intitulée « L’artiste comme traducteur ». Martin Waldmeier a récemment remporté le Unsolicited Proposal Program d’Apexart à New York avec son exposition Death of a Cameraman. Né en 1984 à Bâle (CH), il vit et travaille entre Londres et Varsovie.
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